Volume unique par Andi Watson, édité en VF par Çà et là, 170x240mm, 200 pages, 20,00€. Sorti en octobre 2017.
Disponible en numérique à 7,99€.
J’ai profité d’une promo sur Izneo pour me procurer la réédition en 2017 chez Çà et là de Breakfast after noon d’Andi Watson, déjà paru chez Casterman en 2002.
Rob et Louise, petit couple de trentenaires anglais, vont se marier. Du moins, c’est leur projet, mis à mal par leur licenciement de la faïencerie Windsor. Cette perte d’emploi va être vécue très différemment par les deux jeunes gens et Rob va commencer à s’enfoncer dans le déni et la dépression…
Même si cette BD a déjà presque vingt ans, son sujet est toujours autant d’actualité, nous faisant suivre un couple face au chômage et ses conséquences. À l’aide d’un trait simple mais précis et dynamique, Andi Watson s’intéresse plus particulièrement au personnage de Rob, qui va extrêmement mal vivre cette perte, comme si on lui arrachait une part de son identité. Il refuse de voir la réalité en face, reste persuadé qu’on ne peut pas lui retirer son poste parce qu’il aime son travail et qu’il le fait bien, et ne peut se résigner à accepter sa situation.
Rob n’est en soi pas très sympathique. On sent bien que c’est un bon gars mais il s’entête dans son attitude immature, semblant persuadé que c’est au monde autour de lui de s’adapter à ses envies. Watson parvient à nous décrire son personnage de manière très précise, avec des détails très simples : tandis que Rob s’enfonce, ne fait aucun effort, attend que les choses s’arrangent toutes seules, sa fiancée se bouge, se forme, tente de trouver à nouveau sa place sur le difficile marché du travail. Certes, elle avait un poste sans guère d’intérêt chez Windsor là où Rob se croyait indispensable, très spécialisé… et donc d’autant plus désemparé quand il faut trouver un autre travail, qui ne correspondra jamais à ses compétences acquises par l’expérience. Difficile pour lui d’admettre que ce qu’il croyait être sa vie n’est plus et qu’il doit désormais accepter de repartir de zéro. Alors il sombre.
Si Rob est évidemment agaçant, il en est également un peu touchant quand les conséquences de sa mauvaise volonté et de son entêtement immature lui reviennent dans la face. On est juste face à un brave gars qui croyait sa vie toute tracée, sans avoir besoin de se prendre la tête et qui se retrouve à devoir tout réapprendre, à se battre de nouveau pour retrouver une place sociale qu’il croyait inébranlable.
Il reste là, désarçonné, sans comprendre, sous le choc, incapable d’accepter le changement, paralysé par ce sentiment de honte et d’injustice. Ce n’est pas glorieux mais le portrait que dresse Andi Watson est fin, précis, minutieux, sans complaisance… et on se demande combien de temps Louise va pouvoir supporter ce boulet grincheux qui ne fait aucun effort y compris pour elle.
Cette chronique sociale, si typiquement anglaise (comment ne pas penser à Ken Loach ?), est donc une belle lecture, même si je reste nettement plus dubitative sur la fin, un peu expédiée et un poil agaçante (pas sûre d’avoir tout compris d’ailleurs).