Volume unique par Guillaume Singelin, édité en VF par Label 619/Ankama, 197x277mm, 208 pages, 19,90€. Sorti en mars 2019.
Disponible en version numérique à 9,99€.
Publiée d’abord aux USA chez First Second puis en France chez Label 619/Ankama, P.T.S.D. est une BD du français Guillaume Singelin, déjà connu des lecteurs du Label 619 avec The Grocery en collaboration avec Aurélien Ducoudray.
Jun est revenue de la guerre blessée autant physiquement que mentalement. Seule, errant dans la ville sans guère d’autre but que de trouver les antalgiques qui la soulagent des souffrances qui la bouffent, elle ne laisse personne l’approcher.
P.T.S.D. c’est l’acronyme de Post-traumatic Stress Disorder, ou Etat de stress post-traumatique en français. Jun est comme tous ces vétérans revenus du front couverts de cicatrices et rongés par leurs souvenirs des horreurs qu’ils ont vécues. Cette guerre dont elle a réchappé, contrairement à bon nombre de ses camarades, on n’en apprendra rien de précis. Mais au fil des flash-backs qui apparaissent au gré de son histoire, on découvrira son quotidien de sniper, ne sachant pas précisément pourquoi elle combattait, mais ne se fixant plus que pour seule mission de protéger ses coéquipiers.
Depuis son retour, elle erre dans les rues d’une ville grouillante de monde mais où elle est totalement seule et abandonnée. L’armée l’a détruite puis oubliée aussitôt qu’elle n’a plus été utile. Comme tant d’autres, elle ne tient qu’à grands coups de cachets pour tenter de calmer les cauchemars et la douleur permanente. Une droguée à l’âme brisée, jamais totalement revenue du front.
Comme tant d’autres, elle pourrait sombrer. Mais sa rencontre avec la lumineuse et volontaire Léona, qui lui tend la main malgré tout, va l’obliger à s’interroger : elle refuse toute aide, préférant rester seule dans cette jungle urbaine, mordant comme un animal sauvage blessé toute main qui l’approche… mais est-ce la solution ?
Face à la violence des gangs qui dealent les médicaments qui les font tenir, elle et ses camarades de galère, elle ressent alors la rage et l’appel du combat qui la renvoient directement dans un quotidien de traque et de violence qu’elle n’a jamais vraiment quitté. Quitte à mettre les autres vétérans en danger. Une sorte de fuite en avant pleine de colère et de rancœur pour ne plus sentir sa culpabilité d’avoir survécu tout en abandonnant ses frères d’armes.
P.T.S.D., c’est le récit d’une rédemption, d’une renaissance, celle d’une femme qui se bat pour se réapproprier sa vie, pour trouver une nouvelle place dans un société qui ne veut plus d’elle après l’avoir utilisée en chair à canon.
Guillaume Singelin utilise pour ça un graphisme qui pourrait paraître doux voire mignon… mais qui dégage surtout une énergie et une présence énormes. Les couleurs sont sublimes, sachant jouer de la luminosité pour donner des ambiances particulières que ce soit aux petites rues animées de la ville ou à la jungle de la guerre. On ressent les textures, les odeurs, l’humidité, la foule, tout ces détails qui apportent une richesse incroyable à cet univers graphique particulièrement expressif, fin et précis. Il y a du Ghost in the shell et du Akira dans ces pages, avec une narration très rythmée, notamment dans les phases de combat, brillantes et dynamiques.
Beaucoup de pages sont sans dialogue, permettant de pleinement apprécier ce qui s’en dégage, tour à tour la puissance et la douceur, la rage et la sérénité, le ras-le-bol et la volonté.
P.T.S.D. est une très belle BD, avec une galerie de personnages forts et marquants, une grande richesse graphique, un univers aux superbes couleurs, et un moment d’espoir dans une monde de merde…
Bravo pour ta chronique. J’ai acheté P.T.S.D. dès sa sortie car je suis assez fan de ce que fait Singelin. J’avais eu peur d’une histoire un peu simpliste, basée sur l’action et si l’action est bien là, l’histoire est bien fouillée, y compris au niveau des “méchants”. En tout cas, tu montres bien les points forts de l’ouvrage et je ne peux que conseiller de le lire !