Volume unique par Serge Lehman et Frederik Peeters, édité par Delcourt en janvier 2018, 198x263mm, 330 pages, 29,95€.
Voilà déjà pas mal d’années que je suis Frederik Peeters, depuis son fabuleux Pilules bleues, et j’avais remarqué la sortie d’un nouveau one-shot chez Delcourt en janvier 2018, où il mettait en images le scénario de Serge Lehman : L’homme gribouillé.
Dans la famille Couvreur, il y a d’abord Maud, autrice reconnue de contes pour enfants. Sa fille Betty, souffrant régulièrement de crises d’aphasie. Et sa petite-fille Clara, aussi douée que sa grand-mère pour raconter des histoires.
Le jour où Maud fait un malaise, Clara se retrouve face à un individu étrange, qui lui demande de lui remettre un paquet…
L’homme gribouillé, c’est une quête familiale où une mère et sa fille vont devoir dérouler l’histoire de leurs aïeules dont elles ne savent en fait rien. Une quête où s’entremêlent Histoire, religion, créatures mystiques et rituels du fond des âges.
Maud, Betty et Clara forment une famille unie, exclusivement féminine. La grand-mère et la petite-fille partagent un amour des histoires qu’elles excellent à raconter là où Betty est un peu à part, maquettiste dans la maison d’édition des livres de sa mère. Mettant en forme les fictions d’autrui, elle connaît de plus des crises où elle devient incapable d’émettre la moindre parole. Un comble dans une famille de conteuses.
Le malaise de sa mère et l’irruption d’un individu louche dans leur vie va l’obliger à quitter son nid protecteur pour en savoir un peu plus sur une histoire familiale que même sa fille n’aurait pas pu imaginer.
Dès les premières pages, les auteurs parviennent à créer une ambiance particulière : le noir et blanc, le gris omniprésent, la pluie qui ne cesse de tomber et oblige à se réfugier dans autant d’endroits qui sont comme des huis-clos… Ambiance très conte qu’on raconte pour se faire peur le soir d’Halloween. Avec en même temps énormément de tendresse et d’amour entre les femmes de cette histoire, y compris Jasmine qui aide Maud au quotidien. Une famille comme un cocon douillet où se réfugier quand la météo est aussi pluvieuse.
Quand Maud fait son malaise, ce fragile équilibre est rompu et Betty doit sortir de sa réserve pour protéger ses proches. D’un naturel plutôt taiseux, même en dehors de son aphasie, elle n’a pas la gouaille de sa mère et de sa fille sans pour autant être du genre à se laisser faire, y compris avec certains auteurs de sa maison d’édition, disons malsains. Les femmes de la famille ont du caractère… Et ce n’est sans doute pas pour rien vu ce que Betty et Clara vont découvrir.
Je suis venue à L’homme gribouillé pour le trait de Frederik Peeters, toujours aussi beau, énergique, expressif et accrocheur, sa narration impeccable, dynamique, élégante. J’ai été d’autant plus conquise par l’histoire proposée par Serge Lehman, prenante et mystérieuse à souhait – tout ne me semble pas totalement élucidé à la fin mais c’est le propre des légendes de garder un peu de leurs secrets… -, ses personnages attachants, humains, drôles et attendrissants.
Notons néanmoins pour les personnes un peu sensibles qu’il y a quelques cases un peu « graphiques », des trépas un peu salissants.
L’homme gribouillé est une belle lecture, intense, accrocheuse, hautement divertissante, efficace, qui nous balade aux côtés d’une famille de femmes attachantes, qui n’ont finalement besoin de personne pour avancer et s’en sortir face à un sombre mystère enfoui depuis des siècles.
Merci pour ton avis. Je n’ai pas été convaincu par la fin (j’attendais mieux de Lehman qui est un excellent scénariste) mais j’ai beaucoup aimé les personnages, notamment ceux de Clara et Jasmine. Une bonne lecture que je conseille, moi aussi.