1 février 2023

The Case of Hana & Alice

Film d’animation de Shunji Iwai, 1h42.
Sortie dans les salles françaises le 11 mai 2016.
Site officiel japonais où voir la bande-annonce

Premier long métrage en compétition au Festival d’Annecy 2015, The case of Hana & Alice est réalisé et géré de bout en bout par Shunji Iwai, un artiste japonais un peu touche-à-tout apparemment bien connu dans son pays, assez peu en France.

L'affiche japonaiseTetsuko Arisugawa, 14 ans, vient d’emménager dans son nouveau quartier avec sa mère, écrivaine un peu excessive. Son arrivée au collège ne se fait pas facilement puisqu’elle s’installe sans le savoir à un bureau maudit qui fait d’elle le nouveau mouton noir de la classe. Mais elle n’est pas du genre à se laisser faire et va petit à petit trouver sa place en démêlant les rumeurs de la réalité, grâce notamment à sa voisine recluse Hana…

Je ne savais absolument rien de ce film en entrant dans la salle et finalement, c’était sans doute pour le mieux, tant il ne ressemble pas aux autres longs métrages d’animation japonaise que j’ai pu voir.
Sans doute parce que son réalisateur, Shunji Iwai, comme on l’apprend lors de la conférence de presse qui suit, est avant tout un habitué des films en prises de vues réelles et qu’il s’agit ici de sa première incursion dans l’animation. S’il sait dessiner, il ne connaît en fait rien à la technique proprement dite et a commencé par tourner 99% des scènes en prises de vues réelles, permettant ainsi aux animateurs (20 pour l’animation 3D des personnages, 150 pour l’animation traditionnelle) de prendre des bases de mouvement et revenir à l’essence même du jeu qu’il est souvent très difficile de trouver dans un film d’animation. Et s’il a justement choisi l’animation plutôt que le cinéma live, c’est aussi parce que cela permet un autre impact émotionnel, un autre ressenti, certaines choses étant parfois difficiles à retranscrire en prises de vues réelles (il donne l’exemple de quelques scènes au ralenti, qui n’auraient rien rendu en live, un ressenti trop grossier, là où on a plus de finesse en animation).

Car ce film a une histoire originale, c’est une préquelle. En 2004 est sorti au Japon Hana & Alice (Hana to Arisu) avec dans les rôles titres Anne Suzuki et Yu Aoi, s’attachant à deux lycéennes, une ancienne recluse qui a pu reprendre sa vie grâce à l’aide de la seconde, sa voisine (si j’ai bien compris, à la base c’était juste prévu comme petit film de promo de KitKat pour Nestlé…). Le film d’aujourd’hui explique leur rencontre et comment elles se sont apprivoisées l’une l’autre. Cela donne forcément une saveur particulière à cette histoire, qui a un background fourni, déjà riche.
Qui plus est, et c’est là un avantage de l’animation, il a pu reprendre les mêmes actrices qu’en 2004 pour les rôles principaux, sans que la question de l’âge ne pose le moindre problème. Le doublage est d’ailleurs une des réussites du film, les deux actrices se projetant pleinement dans leur personnage.

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Quand les premières images se lancent, je suis un peu perplexe : l’animation est bizarre, un peu saccadée. Mais au fur et à mesure que se déploie le film, on ressent effectivement quelque chose de différent par rapport à d’autres : si les mouvements des personnages font bizarres c’est parce qu’ils ne font pas animation, ils font vrai. Lié sans doute aux prises de vues réelles qui ont aidé les animateurs. Cela donne une vie supplémentaire à l’ensemble, avec une véritable direction d’acteurs qui donne là encore un style très particulier, rapidement attachant.
Qui plus est, les personnages sont loin d’être classiques.
Alice (Arisu en japonais) a ainsi un caractère assez complexe : d’un côté, elle fait de la danse de ballet depuis 7 ans et elle est plutôt douée, comme nous le prouvent les quelques scènes de démonstration, très belles. De l’autre, elle est du genre énergique et volontaire, n’hésitant pas à cogner ceux qui veulent se la jouer menaçant ou trop moqueurs (ça contrebalance sacrément le côté gracieux de ses mouvements de danseuse). Quand elle veut quelque chose, elle avance, quitte à se ramasser la tronche, tout en gardant un petit côté candide (mais pas idiote) très frais. Elle est en fait très naturelle, directe et drôle, permettant à l’histoire de ne jamais faire de surplace malgré les nombreux malentendus et quiproquos qui vont jalonner ses premiers jours dans sa nouvelle école. Sa relation blasée avec sa mère un peu fofolle est même hilarante.
Hana quant à elle n’a rien de la petite timide introvertie qu’on pourrait imaginer planquée dans sa chambre depuis plus d’un an. Elle est un peu brusque, autoritaire, pas toujours très causante mais au fil de ses aventures totalement rocambolesques avec Alice, elle va s’ouvrir et faire face à ses peurs, assumant et acceptant simplement de parfois préférer une illusion à une froide réalité tout en en ayant parfaitement conscience. Leur duo est inattendu, d’abord impossible pour devenir profondément tendre et chaleureux.
Je pourrais également parler de Moo, la pseudo-mystique de l’école dont les quelques scènes sont franchement tordantes et là encore très lucides. À partir de quelques rumeurs foireuses est née une légende urbaine dont elle se sert pour trouver sa place, acceptant néanmoins de permettre à Alice de s’intégrer malgré tout.

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Qu’on ne s’y trompe pas, on n’est pas là du tout face à un film sur l’ijime (harcèlement scolaire) et le phénomène hikikomori (des jeunes retranchés chez eux) : le tout est bourré de tendresse, de bonne humeur, de plans complètement débiles qui amènent à des courses-poursuites foireuses, sans un gramme de véritable méchanceté. On rit beaucoup, on est ému également, aidés par le rendu vraiment très complet du “jeu” des personnages, pas si courant en animation. Avec qui plus est un très bon équilibre musical (la BO est également signée Shunji Iwai) qui accompagne parfaitement le déroulement de l’histoire sans besoin d’en faire trop (comme cela arrive régulièrement dans certains films d’animation).
Lors de la conférence de presse, le réalisateur a indiqué être autant intéressé par les films en prises de vues réelles ou d’animation, qu’il ne voit aucune barrière fixe entre eux et maintenant qu’il a goûté aux deux, il compte se poser la question à chaque nouveau projet. Ainsi, il a déjà quelques idées pour deux prochains films d’animation, un dans le futur, l’autre historique. Voilà qui semble intéressant à suivre…

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Il ne s’imaginait d’ailleurs pas pouvoir ensuite présenter ce films dans les festivals, dont celui d’Annecy. Franchement, cela aurait dommage de le louper… Et je crois avoir vu Cédric Littardi lors de la conférence, peut-être une chance d’une sortie française ? Sachant que le film est sorti en février au Japon, qu’il a été bien accueilli et qu’il doit sortir en août en DVD.
(Edit : le film sort dans les salles françaises le 11 mai 2016 sous le titre Hana et Alice mènent l’enquête.)

À la fin de la conférence, je profite de quelques instants pour lui faire signer mon guide. J’apprends à faire ma groupie au fil des éditions…

2 réflexions sur « The Case of Hana & Alice »

  1. J’avoue que cela a été une surprise de voir ce film annoncé. J’avais vu le film live il y a quelques années et n’en gardais pas un souvenir mémorable. La trame de l’histoire était dans la veine de ces films typiquement japo-niais : histoire d’amitié entre deux filles qui se disputent le même garçon, avec quelques belles images en prime (les passages de danse). Résultat, quand j’ai vu le synopsis du film d’animation, je ne voyais pas vraiment le lien entre les deux oeuvres. Pour le coup cette version m’a l’air plus intéressante.

    1. En même temps, le premier film était au tout départ une pub KitKat… Ça doit limiter les possibilités 🙂 En tout cas, je n’ai pas trouvé le nouveau niais ou mièvre…

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