Mazette, quelle journée… 4 séances à tenir, c’est toujours aussi complexe même si sur ce coup-là, 3 d’entre elles n’étaient pas des projections à proprement parler. En tout cas, belle journée de rencontres et de discussions, avec de sacrés passionnés.
Les courts métrages du jour
J’arrive en ville à 9h et n’hésite pas à prendre un bon p’tit dej pour tenir le coup. J’ai bien fait, je n’ai pas arrêté de courir toute la journée. Mais avant que tout commence, je fais un tour aux haras voir un peu comment c’est installé cette année et j’en profite pour assister à la fin des p’tits dej du cours, au bar du haras, où les réalisateurs des courts métrages diffusés la veille rencontrent le public et discutent de leur travail. Bon, pas de chance, je tombe sur le seul film que je n’ai pas vu hier, étant partie pour prendre mon bus…
10h, petit tour à la salle de presse pour poster une photo Instagram, c’est bien le seul moment de cette journée où je pourrais utiliser un wifi. Je file ensuite au cinéma Décavision pour ma première séance du jour, consacrée aux courts métrages n°2. Fort heureusement, bien plus enthousiasmants qu’hier. Bon, que 31 sur 50 pour mes notes, mais à cause de 2 films franchement… j’hésite entre les mots, je vais rester courtoise, je dirai décevants (un très très laid, jamais vu un dessin aussi laid et une animation aussi foireuse, l’autre mieux maîtrisé mais totalement épileptique). Mais j’aurais sans aucun doute plaisir à revenir sur certains courts de ce programme, dont une adaptation d’une nouvelle de Lovecraft par un réalisateur mexicain vraiment bon.
Qui plus est, si je n’accroche toujours pas à la bande-annonce officielle, le film des Gobelins du jour est excellent, reprenant le lapin de manière rythmée et hilarante. Ça fait plaisir !
Inside Out, le prochain Pixar !
Déjà midi, je file me chercher à manger (de bonnes potatoes avalées en vitesse en marchant), je croise en passant la Google Street Car (non, je n’ai pas fait coucou !)… et j’arrive aux haras en rigolant nerveusement quand je vois la file d’attente sous un soleil de plomb. Évidemment, la présentation des premières images du prochain Pixar, Inside Out, par Pete Docter himself, ça fait venir du monde… L’endroit est même blindé de caméras de télévision, j’ai entraperçu BFM TV notamment (non, je n’ai toujours pas fait coucou !).
Je finis pas si mal installée vu ma place dans la file d’attente, et on nous annonce que les lunettes 3D qu’on nous a fait prendre à l’entrée ne serviront à rien. Pas moi qui m’en plaindrais…
Comme d’habitude, je ne prends pas l’appareil de traduction, j’ai remarqué au fil des éditions que je comprenais mieux leur anglais que la traduction se superposant à leur voix… Et Pete Docter a su se faire comprendre sans problème !
Mais si, Pete Docter voyons ! On lui doit notamment Monstres & cie et Là-haut en tant que réalisateur (bien plus encore en tant que membre de Pixar). Bien sûr, interdiction totale de prendre la moindre photo, des men in black veillent et ils sont impitoyables.
En tout cas, ce Inside Out, à sortir en juin 2015, risque bien d’être encore un bon cru. Pete Docter nous explique d’où lui est venu l’idée. Il nous montre des photos de sa fille, Elie (qui d’ailleurs doublait Ellie jeune dans Là-haut), gamine toute joyeuse et sympa… jusqu’à ce que débute l’adolescence et le rejet de tout (y compris de prendre la pose pour les photos de papa, comme on peut le voir sur les clichés). Et il s’est demandé “mais qu’est-ce qu’ils ont dans la tête ?”. Il suffit de ça pour lancer un projet de film !
Inside Out suit donc Riley, depuis sa naissance jusqu’à son adolescence et son déménagement à San Francisco. Et surtout, on suit tout ça au travers de ses émotions : Joy, Anger, Fear, Disgust et Sadness, chacune prenant la direction des réactions de Riley au fil de son quotidien. On a pu voir les premières minutes du film, ainsi qu’une scène, toutes deux non finalisées, mais c’était déjà totalement tordant et visuellement magnifique, plein d’originalité et de trouvailles. La salle a en tout cas apprécié.
Et coup de chance, j’ai bien fait de rester jusqu’au bout, on a droit à un court inédit de Monstres Academy plutôt drôle mettant en scène la fameuse fraternité intégrée par Bob et Sully dans le film.
Isao Takahata raconte…
Je sors vite et je cours au Décavision en espérant que ma réservation pour la séance de 14h est bonne. On n’a pas tous les jours la chance d’assister à une rencontre avec Isao Takahata ! Ayant reçu un Cristal d’honneur la veille lors de la cérémonie d’ouverture et la projection de son dernier film Le conte de la princesse Kaguya, il remet ça aujourd’hui avec 1h30 de discussions avec Xavier Kawa-Topor, et comme interprète Ilan Nguyên (qui devait sacrément maîtriser la chose pour réussir à retranscrire les réponses souvent très longues du réalisateur. On est loin des mangaka qui répondent juste par oui ou par non !).
La discussion est très intéressante, portant principalement sur son dernier film et pour ceux qui ne l’ont pas vu – comme moi – on a droit à une longue bande-annonce qui nous donne déjà le style graphique, très original. En effet, on est plus proche du croquis que du dessin complet, rien d’étonnant de la part du réalisateur de Omoide Poroporo ou Mes voisins les Yamada, et Takahata explique que son envie était justement de donner l’impression qu’on avait là un trait spontané, direct, comme s’il venait d’avoir été fait devant nous, pas quelque chose de longuement travaillé. Ça a d’ailleurs constitué la principale difficulté, pour réussir à garder cette impression quand le mouvement était insufflé.
Il explique également que l’histoire d’origine, tous les japonais la connaissent mais qu’elle est très difficile à adapter, car très courte et avec peu de matière entre le début et la fin. Il a donc voulu donner une vraie histoire, ancrée dans la “réalité”, pas un conte de fées (il semble d’ailleurs un peu tiquer sur le titre français). C’était en fait un projet qu’il avait déjà pensé faire il y a une cinquantaine d’années, à ses débuts mais qui ne s’était pas concrétisé. Finalement, c’est peut-être aussi bien car le résultat à l’époque aurait été forcément très différent de l’actuel, avec l’expérience des années en plus.
Je découvre par la même occasion que c’est la première fois qu’il collabore avec Joe Hisaishi pour la musique. Vu qu’il s’agit plutôt du compositeur attitré de Hayao Miyazaki, Takahata le connaissait bien sûr mais ne voulait jusque-là pas trop travailler avec pour ne pas faire redondance. Mais là, les circonstances étaient différentes et il est très content du résultat. Pas de doute, je ferai attention à la BO quand je verrai le film (vu qu’il est distribué par Disney, ça ne devrait pas poser de souci niveau quantité de salles).
Le public peut aussi poser des questions mais la plupart semble obsédé par l’idée de lui demander quelles sont ses influences : Frédéric Back (il le revendique, d’ailleurs, notamment son court métrage Crac !), Ozu, Te Wei, Ocelot ? Je trouve quelque peu dommage de vouloir réduire un si grand réalisateur à ses éventuelles influences, tout de même… Olivier Fallaix demande quant à lui si, comme ses confrères Hayao Miayzaki et Toshio Suzuki, il compte prendre sa retraite. Réponse de l’intéressé : je ne sais pas, ce n’est pas vraiment moi qui décide, c’est le studio qui me propose ou non un projet.
En tout cas, cette séance a été un véritable enchantement, permettant la rencontre d’un maître du genre (en plus j’étais au premier rang, très bien placée je trouve). Et puis voir Takahata et Suzuki juste à côté de soi, pfiou, ça fait quelque chose (j’ai évité les photos quand ils étaient à côté de moi en fin de séance, par respect).
Découverte de Mune
N’empêche, le temps file et moi aussi, vers ma séance de 16h salle Pierre Lamy. Je vous ai dit que j’ai passé mon temps à courir ?
J’arrive, déjà la queue devant la salle. Mais pourquoi la queue pour ceux qui ont réservé ? Beaucoup posent la question. On attend, on attend… Arrive 16h15, enfin on entre. En fait, un projecteur a explosé juste avant la séance et ils ont eu besoin de temps pour gérer la situation.
Car si cette séance n’a pas projeté réellement de films, elle a été l’occasion pour moi de découvrir un prochain film d’animation français, Mune, par Benoît Philippon et Alexandre Heboyan. Le premier est là pour nous parler de ce film, qui sortira au premier semestre 2015, l’autre est à Montréal en train de finaliser les derniers plans.
On a droit à une bande-annonce et à deux scènes en cours de finalisation, et c’est franchement beau. L’histoire ? Écrite il y a 10 ans par Benoît Philippon, elle met en scène un autre monde autour duquel tourne le soleil et la lune. Les deux astres ont leur temple et leur gardien, qui doivent savoir les gérer et les diriger pour garder l’équilibre de leur monde. Mais voilà, l’heure de la succession arrive et si du côté du soleil, c’est l’attendu Sohone qui est désigné, même si au delà de la force et de la grande gueule, il n’est pas très doué pour autre chose, pour la lune, c’est l’innocent faune Mune qui gagne… alors qu’il ne sait rien faire. Forcément, catastrophe, soleil volé par le méchant de service qui veut se venger et quête du héros Mune pour sauver la situation qu’il a créée involontairement, avec l’aide de Sohone et de la cultivée Cire (qui comme son nom l’indique est en… cire, donc ne supporte ni le froid ni le chaud).
Visuellement, c’est vraiment joli, avec un travail sur les textures, les personnages, les visages hyper-expressifs, les mouvements (Mune, mélange entre Bambi pour les yeux et Spiderman pour les pirouettes). Ce sera un film familial donc ne pas s’attendre à du trop poussé niveau histoire mais je crains tout de même un côté trop manichéen, jour/nuit, gentil/méchant, pureté/vengeance, mais il vaut mieux attendre le résultat final pour savoir. Et puis non, ils ne sont pas du tout fans de Miyazaki, ces araignées-là, ce ne sont pas du tout des noiraudes (remarque ironique de Benoît Philippon).
On prend quelques minutes pour que le producteur Aton Soumache nous parle vite fait de l’adaptation du Petit Prince de Saint Exupéry par Mark Osborne. Un projet fou, hyper-ambitieux, onéreux, refusé par beaucoup de réalisateurs qui jugeaient le challenge impossible : comment adapter un tel mythe de la littérature ? Aucune image à nous montrer, il faudra attendre fin 2015 pour juger… Mais savoir que le design devrait être signé Pete de Sève, ça titille la curiosité…
Ouf, 17h30, je ne loupe pas mon bus malgré tout (je suis un peu psychorigide avec cette histoire de bus mais à 18h, je n’ai qu’une envie, rentrer chez moi)… Alors, sacrée journée, non ?
Demain, plus calme mais tout de même…