Volume unique par Miki Yamamoto, édité en VF par Pika en mai 2018.
Sens de lecture japonais, 170x240mm, 208 pages, 16,00€.
Disponible en version numérique, 9,99€.
En mai 2018, Pika propose dans sa collection Graphics le one-shot Sunny Sunny Ann! de Miki Yamamoto.
Ann est ce qu’on pourrait appeler une âme libre. Sans attache, vivant dans sa voiture, au jour le jour, elle n’a besoin que de quelques sous gagnés pour profiter de la vie sans s’embarrasser des convenances. Malgré toutes les difficultés que cette liberté lui vaut…
Impossible de commencer à lire Sunny Sunny Ann! sans immédiatement penser à Kyôko Okazaki et notamment sa première œuvre Pink, sortie chez Casterman voilà quelques années. Là aussi, on avait droit à une héroïne très libre et sans limite, aux mœurs que certains jugeraient scandaleuses mais qui lui permettaient de supporter son quotidien.
Comme Yumi dans Pink, Ann se prostitue à l’occasion avec les hommes de sa petite ville, histoire de gagner un peu d’argent qui lui permet de pouvoir profiter du quotidien, le plus souvent dehors. Elle ne s’encombre pas trop du superflu, vivant des plus simplement, au gré des jours qui passent, jouant avec les enfants du coin, lisant, somnolant.
Jusqu’à ce qu’une rencontre tourne mal – une femme qui vend occasionnellement son corps n’a jamais le droit de dire non selon certains… – et qu’elle se retrouve à devoir s’éloigner. Elle en profite malgré tout pour voir du pays et profiter de cette fameuse liberté si chère payée.
Si les premiers chapitres nous la font directement suivre, on rencontre ensuite d’autres personnages féminins qu’elle va croiser sur son chemin.
Comme cette jeune femme nouvellement mariée à un homme âgé riche, qui subit évidemment l’opprobre de la famille de son époux. Une plantureuse fille comme elle ne peut évidemment s’intéresser à ce vieux au bord de la mort que pour son argent… Mais cela empêche-t-il les sentiments, le dévouement ? Cette famille, si fière de sa situation sociale, de sa réussite, si prête à juger cette nouvelle venue vue comme une opportuniste, a beau être dans la norme la plus parfaite de la société, sa manière de traiter l’aîné, sans se soucier de ce qu’il pense,de ce qu’il vit, de ses souvenirs chéris, le réduisant à un simple porte-feuille en fauteuil roulant, est largement plus méprisable que cette femme vivant hors des sentiers battus… Forcément, Ann ne peut qu’être du côté de celle-ci, sans doute pas parfaite, certainement intéressée mais pas malveillante pour autant…
Et puis il y a aussi cette petite fille que la mère néglige. Elle découvre que les autres parents s’occupent de leur progéniture quand elle ne peut que regarder sa génitrice s’engueuler au téléphone avec son ex. Là encore, une fille un peu dans cette zone d’ombre des normes, qu’Ann va prendre en amitié et aider à sa manière pour lui permettre d’exister enfin aux yeux de sa mère.
Ainsi, Ann va utiliser sa liberté chérie et ce qu’elle a traversé pour apporter à d’autres femmes une manière de vivre un peu hors limite, leur donnant en quelque sorte la force et le droit de vivre en dehors des normes. Sans jugement, sans bonne morale, mais une grosse dose de courage et d’intégrité face ses principes de vie, certainement réprouvées par beaucoup mais qui lui permettent simplement d’exister par elle-même.
Pour ce genre d’histoire, on ne peut pas avoir un dessin classique. Et celui de Miki Yamamoto ne l’est assurément pas. Très lâché, explosif, crayonné, sans trame, juste blanc et noir, le trait est à peu près aussi libre que son héroïne. Cela donne un récit vivant, plein d’énergie et finalement très attachant, comme ce fabuleux personnage d’Ann qu’on aurait envie de suivre encore quelque temps…
J’ai eu le titre pour mon anniversaire (merci Yin) et j’ai beaucoup aimé sa lecture. De toute façon, je l’aurai acheté, des titres à la Kyoko Okazaki se font trop rares. Je suis en total accord avec ta chronique, et je conseille moi aussi de ne pas rater ce manga !