9h10, pas de pluie et il ferait presque beau. En contrepartie, on caille, un vent aussi froid en juin, franchement…
Je me pose pour quelques minutes aux petits dej du court à Bonlieu, sachant que je ne pourrai pas rester longtemps. Au moins, je peux entendre deux réalisateurs et gagner un petit jus de fruit, histoire de bien lancer la journée. Je pars à la fin de l’intervention de Theodore Ushev, dont j’ai d’ailleurs beaucoup aimé le court métrage…
Je préfère ne pas tarder pour pouvoir me poser tranquillement au Pathé 5 pour ma séance de 10h. C’est une petite salle et je n’ai pas envie de me retrouver le nez sur l’écran. J’avais très envie de voir ce documentaire et réussi à avoir une place finalement dimanche, quand quelques-unes avaient été rajoutées. Dommage tout de même d’avoir mis en même temps ce docu et un autre du même genre dans une salle à côté, sur Jean-François Laguionie, que j’aurais bien aimé voir également.
Et donc ce docu, c’est La Fascination de Michael Dudok de Wit, le réalisateur du long métrage La tortue rouge, diffusée lundi soir lors de la soirée d’ouverture du Festival. Il est également connu pour les courts métrages Le moine et le poisson, réalisé dans le cadre d’une résidence Folimage, et l’oscarisé Father and daughter. Je n’ai pas encore eu l’occasion de les voir mais nul doute désormais que je m’y emploierai une fois la semaine terminée. Quant à La tortue rouge, je ne suis pas bien sûre qu’on aura droit à une bonne distribution sur Annecy lors de sa sortie cinéma le 29 juin prochain mais je compte bien le voir d’une manière ou d’une autre. Surtout après avoir vu ce documentaire, qui retrace le travail du réalisateur et de son équipe pendant la production.
En juin 2015, ce film avait eu droit à un Work in progress qui avait fait salle comble. Et les images que l’on peut en apercevoir durant le docu sont de toute beauté et donnent évidemment envie de voir le résultat final. Documentaire que je vous recommande donc chaudement si jamais vous en aviez l’occasion (on peut rêver, non ?).
La tortue rouge, c’est un projet de longue haleine. Michael Dudok de Wit l’a commencé en 2007, suite à un mail du studio Ghibli qui lui proposait de distribuer son court métrage Father and daughter au Japon. Et également de travailler avec eux sur un long métrage. Rien que ça ! Il est alors parti d’une simple idée : un homme perdu sur une île déserte, en pleine nature, et sa manière de survivre.
Pendant près de cinq ans il a travaillé à l’écriture du scénario, d’abord seul puis avec des amis. Une fois le scénario validé, notamment par Ghibli, une année de pause pour la recherche des financements. Puis toute la réalisation a pu commencer, entre Angoulême et Paris, tandis qu’une autre partie du travail était effectuée dans un studio en Hongrie.
Travail d’abord papier et crayon, que le réalisateur maîtrise, puis sur tablettes graphiques, apportant finalement autant de facilité d’utilisation et s’avérant plus pratique et efficace. Le travail fut néanmoins long et difficile, les équipes courant après le temps.
Et là où le réalisateur, pour ses courts métrages, utilisait la musique comme une muse qui lui permettait d’avancer sur la partie graphique, le cheminement a été totalement différent ici. Aucune musique ne lui venait. pendant des années il a espéré, puis a dû se résoudre à trouver un compositeur, arrivé finalement assez tardivement. Beaucoup de recherches, beaucoup d’essais pour finalement tomber sur la perle rare qui a su s’impliquer dans le style du projet.
Une des questions après projection portait sur le degré d’implication de Ghibli. Eux ne pensaient qu’avoir un travail de supervision, d’autant plus curieux du processus créatif différent d’avec les techniques japonaises. Tout a été fait en Europe, aucun animateur japonais n’a participé, ils étaient de toute façon très occupées par Kaguya et Le vent se lève, mais Michael Dudok de Wit tenait à leur demander avis, conseils et suggestions, étant un grand admirateur des films du studio japonais. Mais ils tenaient à lui laisser sa totale indépendance, considérant qu’il s’agissait de son film et que leurs suggestions n’avaient rien d’obligatoire. Une vraie liberté de création !
Le documentaire est déjà en lui-même extrêmement intéressant, surtout pour moi qui connaissais le réalisateur juste de nom, mais les questions après séance ont été passionnantes. Michael Dudok de Wit s’est très volontiers prêté au jeu, on ne pouvait même plus l’arrêter, donnant conseils à de jeunes animateurs, sur la question de la création, les conditions de travail, ses inspirations, et on a très largement débordé l’horaire prévu. On sort de la salle à 12h passés, en ayant pu approcher un véritable créateur obsédé d’animation, doux, humble, drôle, passionné, s’interrogeant énormément sur le sens de son travail et son besoin de l’exprimer.
Il dit lui-même avoir souvent pensé à arrêter, tant c’est difficile, il a dû sacrifier son temps passé avec sa famille à Londres pour finir dans les délais, travaillant parfois 80 à 100 heures par semaine, y compris les week-ends où il aimait être seul pour avancer efficacement sans distraction.
Ce travail intense sur un long métrage lui a beaucoup appris mais il aime également la spontanéité du court métrage où la création est plus personnelle. Mais il dit clairement qu’il est très difficile d’en vivre et qu’il faut alors réussir à trouver comment tenir. Lui a d’abord travaillé dans la pub à Londres, univers bouillonnant d’idées, ce qui lui a suffi pendant 10 ans, puis il a ensuite ressenti le besoin de s’exprimer avec ses histoires, ses idées.
Il ne faut pas hésiter à se poser les grandes questions, nous conseille-t-il, à chercher réellement ce que l’on veut, ce que l’on souhaite exprimer, qui nous sommes. C’est selon lui un bon moyen de s’inspirer et d’éclairer ce qu’on pourra partager dans ses créations.
Bref, voilà une belle rencontre, passionnante et humaine. Michael Dudok de Wit a été d’une grande générosité, simple et très disponible.
Il était d’ailleurs installé juste devant moi dans la salle, me demandant même si je pouvais surveiller ses affaires pendant qu’il s’absentait avant la séance…
Je sors donc de la salle un peu plus tard que prévu, filant manger quelques makis à Kumo dans la galerie Courier comme lundi, ça a le mérite d’être rapide et efficace pour se caler l’estomac. Puis je file à Bonlieu, m’installer à la bibliothèque pour pouvoir me connecter au net et commencer l’écriture de ce présent compte rendu. Le reste de la journée va être un peu chargé, si je peux déjà m’avancer sur ça, ce sera toujours ça de gagné ce soir…
A 14h, je vais pouvoir faire ma première séance à la Grande salle de Bonlieu, pour les courts métrages 3.
J’aime bien cette salle, 900 places et toujours l’assurance d’avoir une bonne ambiance. Et mes deux séances de l’après-midi ne m’ont pas contredite !
Comme toujours, j’arrive à trouver une place qui me plaît bien, avec de l’espace pour les jambes et un seul voisin. Parfait. C’est l’avantage quand on ne cherche pas les places en milieu de rangée, c’est plus simple… Je vois Boulet passer, je me demande ce qu’il a pensé de cette séance…
Pour ma part, pas l’extase : 8 courts métrages, 25 points sur 40. Vu les résumés, je m’y attendais un peu, je ne suis donc pas surprise. Il y a tout de même eu 3 films plutôt sympa. Et également la preuve que les films d’Alberto Vazquez, que j’ai découvert avec Psiconautas (dont la chronique va finir par arriver) ne peuvent être que déprimants et perturbants… Un court russe de 19mn également où je n’ai pas compris grand-chose à part qu’il y a définitivement un style graphique slave qui me sort un peu par les yeux. Et enfin, une confirmation : 15 ans que je vois des courts métrages chinois, 15 ans que je n’y pige rien ! Heureusement, c’était le dernier de la séance et il ne durait “que” 7mn mais… C’était le court épileptique de ce Festival, je crois. Il y en a toujours au moins un…
Pas la grosse fiesta donc mais ça reste intéressant. Et puis, la séance des courts métrages dans la Grande salle, c’est aussi la possibilité de voir le/a réalisateur/trice monter sur scène faire un coucou. Le tout est donc d’éviter de montrer qu’on déteste un court pendant sa projection parce qu’on ne sait pas si son/a créateur/trice n’est pas juste à côté de nous…
15h30, je sors pour re-rentrer aussitôt puisque ma séance de 16h est également à… Oh, merde. C’est quoi ce monde ? C’est la file d’attente des accrédités avec réservation, ça ? Mais… où elle s’arrête ??
OK, ça va être fun. C’est le problème avec les invités exceptionnels, ils ont tendance à faire venir les foules. Je suis déjà moi-même loin dans la file, et je vois passer Marion Montaigne (j’ai évité de faire ma groupie, je sais me tenir, quand même)(OK, j’ai pas osé, en fait…) dépitée devant le monde.
Par la magie de la logique d’une responsable de file, je me retrouve propulsée de quelques mètres devant. Je ne vais pas me plaindre… Heureusement tout de même que je suis au bord de la file, je peux respirer.
On finit par rentrer et je me retrouve pas si mal placée, au troisième rang. J’aime bien pour ces types de rencontre être au plus près de la scène. Ah, Matthieu Pinon devant et la CloneWeb team aussi, je crois. C’est amusant parce que je reconnais régulièrement des gens qui eux par contre ne me connaissent pas.
Il y pas mal de caméras, et des vigiles aussi, comme à chaque fois qu’on a un événement Dreamworks. Gare à ceux qui voudraient pirater…
L’ambiance est top, j’en profite pour filmer la bande-annonce du Festival avec les réactions de la salle (je fais ça chaque année). La bande-annonce Gobelins du jour avec sa Jeanne d’Arc qui fait du pole dance a également ses adeptes.
Et donc l’invité exceptionnel c’est Guillermo del Toro, réalisateur de films comme Hellboy I et II, Le labyrinthe de Pan, Crimson Peak, Pacific Rim. Travaillant depuis 10 ans chez Dreamworks, apportant sa touche sur Megamind, Le chat potté, Les cinq légendes ou Kung Fu Panda 2, il vient nous présenter sa première série animée, prochainement sur Netflix, TrollHunters.
Je serais bien incapable de vous rapporter précisément tout ce qui a été dit lors de cette rencontre. Déjà parce que l’anglais avec un accent mexicain, je galère un peu. D’autant plus quand je commence à être fatiguée. Et surtout, pendant une bonne partie de la discussion étaient diffusés juste au dessus des extraits de certains de ses films : L’échine du diable et Le labyrinthe de Pan. J’avoue que j’étais plutôt hypnotisée par les images, flinguant le peu de concentration que je pouvais encore avoir…
Puis est arrivé un nouvel invité, rejoignant Guillermo sur scène, Jeffrey Katzenberg, grand chef de Dreamworks. L’occasion pour lui de revenir sur ses collaboration avec del Toro depuis qu’il l’a fait entrer au studio voilà 10 ans.
On nous montre enfin la présentation de TrollHunters, adapté d’un roman jeunesse que del Toro a écrit avec Daniel Kraus (sorti en VF chez Bayard). Les fans de Dragons ne devraient pas être trop surpris par le style. Puis deux gros extraits, durant lesquels le jeune héros Jim revêt pour la première fois son armure de TrollHunter ou un de ses combats dans l’arène des Trolls. Ma foi, c’est plutôt joli, les trolls ont un look sympa. Il n’y a plus qu’à attendre fin 2016 voir ce que cela donnera…
Marcel Jean, directeur artistique du Festival, s’invite alors sur scène pour une petite surprise pour Jeffrey Katzenberg à l’occasion de ses 40 ans de carrière. D’abord un petit spot montrant des images des films qu’il a aidés à exister, avec une standing ovation de la salle, puis Marcel Jean lui offre un Golden Ticket, accréditation au Festival d’Annecy à vie. C’est plutôt mignon comme moment…
La séance se termine sous les applaudissements nourris, et je quitte la salle en voyant que chacun joue le jeu des photos, del Toro serrant toutes les mains qui se tendent, discutant, posant…
Franchement, les invités du jour étaient beaux !
Je crois qu’il y avait ensuite une séance de dédicace dans Bonlieu, ça a dû être quelque chose aussi…
Allez, demain, changement de genre, première séance à 9h30 !