Série en cours (8 tomes pour le moment) par Umiharu Shinohara, éditée en VF par komikku, en VO par Houbunsha.
Sens de lecture japonais, 132x178mm, 8,50€.
Deux premiers tomes sortis en août 2013, 192 pages.
Pour la rentrée, komikku nous propose un plongeon direct dans la littérature avec Le maître des livres d’Umiharu Shinohara. Une série qui s’approprie les codes de narration des mangas culinaires à sa façon.
Miyamoto est un simple employé dans une petite entreprise, bien loin des rêves de grand entrepreneur qu’il entretenait en finissant ses études. Après une soirée bien arrosée avec un client, il tombe sur une petite bibliothèque privée, La rose trémière, dédiée à la littérature enfantine. Il y rencontre un employé pas ordinaire, Mikoshiba, plutôt rude dans ses manières et ses paroles, qui n’a pourtant pas son pareil pour renseigner les amateurs de livres…
Codes de narration des mangas culinaires donc, type Le restaurant du bonheur ou Café Dream, car chaque chapitre est l’occasion de s’arrêter sur une œuvre de la littérature enfantine qui permettra au personnage concerné de réfléchir à sa propre situation. Miyamoto est ainsi le candide que suit le lecteur dans sa découverte de cet univers particulier. Pour autant, le propos n’est ni répétitif ni trop prévisible car les personnages rencontrés deviennent souvent des habitués qu’on retrouve au fil des chapitres suivants, permettant la création d’une équipe sympathique où chacun voit son histoire se développer et s’approfondir au fur et à mesure.
Si l’on parle de littérature enfantine, les œuvres proposées sont tout de même de grands classiques : Les quatre filles du Docteur March, L’île au trésor, Robinson Crusoë, etc. Comme les nouveaux venus qui débarquent dans cette fameuse bibliothèque, on aurait tort de juger tous ces rayons blindés de livres sans intérêt pour un œil adulte, comme le prouve d’ailleurs régulièrement l’ombrageux mais attentif Mikoshiba. Le genre de personnage qui fait tout pour ne pas jouer la sympathie facile mais dont on remarque vite la capacité à comprendre les attentes des lecteurs, même s’il ne prend guère de gant.
Si le propos reste assez simple et limpide, il est plutôt efficacement mis en scène, avec cette même curiosité qu’on peut avoir face à un manga culinaire : quelle prochaine œuvre sera mise en avant, quel problème cela permettra-t-il de résoudre, quelle interrogation d’adulte souvent pétri de certitudes trouvera une réponse plus profonde qu’il n’aurait pu le croire au milieu de tous ces livres ?
Je m’interroge d’ailleurs sur la place occupée par les auteurs occidentaux dans cette littérature au Japon (après tout, beaucoup de ces œuvres ont été adaptées en séries animées japonaises, Rémi sans famille, Heidi, Nils Holgersson, etc.). S’il y a un certain nombre d’auteurs japonais cités (comme Kenji Miyazawa auquel le film d’animation L’île de Giovanni fait beaucoup référence, Ranpo Edogawa, ou Osamu Dazai, à l’origine de Je ne suis pas un homme d’Usumaru Furuya), le lecteur occidental ne sera pas perdu pour autant, retrouvant des titres qu’il connaît au moins de nom, à défaut de les avoir lus (il y a également un lexique en fin de volume revenant sur les œuvres et auteurs cités).
Car le gros point fort de la série est l’amour immodéré des livres qui s’en dégage. Un amour que je partage pleinement, au grand dam de mes étagères, même si je reconnais mes grosses lacunes en matière de grands classiques (l’Éducation Nationale pourrait s’inspirer de la série et rendre la lecture de ces œuvres reconnues moins rébarbative, non ?).
Le plaisir de choisir un titre, de se plonger dans une histoire, de chercher à sortir de ses habitudes, d’être curieux et de ne pas se laisser berner par ses préjugés ou ses doutes – tout le monde n’ose pas franchir les portes d’une bibliothèque ou d’une librairie, hélas -, on le retrouve distillé au fil des pages de cette série attachante, légère, drôle, touchante, qui fait du bien à une période du tout écran, tout rapide, tout consommable dans la seconde.
Simplement prendre le temps de se poser au calme avec un bouquin sur les genoux, sans obligation, sans limite, sans se préoccuper des remarques mi-moqueuses mi-atterrées de ceux qui trouvent ça ringard ou sans intérêt. Et peut-être simplement donner envie de franchir le pas et de partager un petit moment précieux tout simple…
Pourquoi se priver ?
© 2011 Umiharu Shinohara / Houbunsha
Ah là là, il faut que j’arrête de lire tes chroniques, tu me donnes à chaque fois envie de lire les bouquins, après ^^
J’ai craqué pour le premier tome et je dois dire que je suis tombé sous son charme, non seulement j’ai pris beaucoup de plaisir à lire ce manga, mais en plus il m’a donné envie de lire les livres cités ! A mettre dans toutes les bibliothèques d’école ! (et aussi les autres 🙂 )
Ah ça y est, j’ai envie de craquer.
Et pourtant, la littérature enfantine et moi, ça fait 3.
Simplement prendre le temps de se poser au calme avec un bouquin sur les genoux, sans obligation, sans limite, sans se préoccuper des remarques mi-moqueuses mi-atterrées de ceux qui trouvent ça ringard ou sans intérêt.
Kwâ, y a des gens comme ça… Heureuse d’être dans ma bulle, parfois.