Volume unique par Kei Lam, édité par Steinkis en mai 2017, 155x230mm, 184 pages, 17,00€.
C’est en furetant sur un site de BD numérique que je remarque dans les nouveautés cette BD, Banana Girl de Kei Lam. Typiquement le genre de BD autobiographique sur un parcours particulier que j’affectionne…
Kei Lam a 6 ans quand avec sa mère, elle part rejoindre son père à Paris, quittant son Hong Kong natal. Il est peintre, vit dans une chambre de bonne et ne doit normalement les recevoir que deux semaines. Mais elles s’installent finalement et Kei découvre sa nouvelle vie dans un pays dont elle ne sait rien.
Trente ans après, Kei Lam revient donc sur son histoire et celle de ses parents, immigrés chinois tentant de trouver leur place dans une société française pas facile à apprivoiser. Barrière de la langue, difficultés à obtenir des papiers, modes de vie et traditions pas évidents à décrypter… Avec beaucoup de lucidité et d’humour, la dessinatrice nous plonge dans le quotidien de son enfance, au travers d’anecdotes et et de souvenirs, aussi bien de son pays d’origine que de ses premiers mois français.
On en apprend ainsi plus sur la culture chinoise, notamment par le passé de ses parents – et là je me rends compte que je ne sais RIEN de la révolution culturelle de Mao Zedong et j’ouvre de grands yeux – tandis que la petite Kei découvre nos étranges coutumes, le chocolat, le fromage, ses nouveaux camarades d’école (et les soirées pyjama) alors qu’elle ne parle pas un mot de français. Le choc culturel n’est pas évident à combler, malgré toute la bonne volonté de ses parents mais la dessinatrice nous raconte ça avec beaucoup de dérision et de simplicité, retrouvant son regard d’enfant face à des difficultés que les adultes auraient bien plus de mal à gérer.
Cela n’empêche pas Kei Lam de décrire ce sentiment de décalage, de non-appartenance, une rupture au niveau de son passé et de son histoire. Sans oublier ces petites pointes de racisme que, bien évidemment, même les enfants peuvent connaître.
Le trait est souple, efficace, soutenant un texte souvent drôle et bourré d’informations sans jamais être bavard. Sans oublier des pages couleurs superbes, qui m’ont fait racheter la BD en version papier, pleines de délicatesse et de poésie.
Pudique, subtil, instructif, drôle, touchant, Banana Girl est une superbe découverte qui parlera à tous : aussi bien à ceux/celles ayant connu le même type d’histoire, venant d’Asie ou pas, qu’à ceux/celles pas du tout concerné.e.s qui pourront y découvrir un regard différent, celui d’une petite fille face à un nouveau monde qu’elle a petit à petit apprivoisé.