Série en 3 tomes par Gou Tanabe, éditée en VF par Doki-Doki.
Sens de lecture japonais, 128x190mm, 8,95€.
Si le thriller n’est pas le genre de prédilection de Doki-Doki, sans doute Mr. Nobody s’est retrouvé dans leur catalogue pour leur avoir tapé dans l’œil…
Susumu Kawai, détective privé, va bientôt se marier. Mais il doit partir en Russie pour une mission dont il ne sait pas grand-chose. Arrivé au lieu de rendez-vous fixé par son client, il rencontre quatre autres personnes, également conviées pour leur talent respectif par un mystérieux homme, qu’ils appellent Mr. Nobody. Susumu se retrouve pris dans une énigme sanglante d’ampleur mondiale qui bouleversera son existence…
On connaît déjà Gou Tanabe en France pour The Outsider chez Glénat et Kasane chez Kana (pas celui chez Ki-oon). Deux œuvres qui ont déjà prouvé que le bonhomme aime mettre en image la tension.
Dans Mr. Nobody, nulle question de surnaturel, on est dans le pur thriller sur fond de guerre froide, de découvertes scientifiques et de mégalomanie assumée.
Le trait de Tanabe est très fin et maîtrisé, jouant la carte du photo-réalisme. Pas le genre qui me parle beaucoup en temps normal mais il faut reconnaître que pour ce type de scénario, ancré dans l’Histoire, s’accrochant autant aux individus, ce style très froid, chirurgical, lisse, convient parfaitement bien. Il y a par contre des scènes extrêmement sombres au point que cela gêne la lisibilité, et la narration peut s’en ressentir, du moins dans les premiers chapitres. Mais là encore, cette ambiance très sombre convient très bien pour une histoire basée sur le secret, où rien ne peut être fait au grand jour. Reste un côté un peu figé, on ne sent pas forcément beaucoup d’énergie se dégager des personnages mais cela ne gêne finalement pas vraiment.
On comprend assez vite de quoi il en retourne, le thème principal n’étant de toute façon pas vraiment le point le plus accrocheur du récit. Cela reste un thème déjà maintes fois abordé dans des livres, films, séries et en soi, on reste dans du classique. Mais du classique efficace car l’auteur ne se contente pas de ça : il apporte un développement approfondi, une histoire construite, un passé plutôt prenant qui apporte tout son intérêt à l’ensemble.
Il est assez courant avec ce genre d’histoires qu’on fasse monter la sauce pour finalement accoucher d’un pétard mouillé assez frustrant. Ici, la tension comme le déroulement de l’enquête sont bien gérés, sans aucun temps mort, on ne perd pas de temps dans des bouleversements et des retournements de situation inutiles juste là pour faire durer les choses. Tout avance assez vite, avec un rythme accrocheur, sans blabla de remplissage.
Il y a sans doute des détails par ci par là pas vraiment expliqués, pas forcément complètement logiques mais l’ensemble fonctionne extrêmement bien. L’auteur a même la bonne idée de ne jouer ni la carte du gore – on ne voit rien de vraiment choquant – ni du sexe ou du fan service racoleur, du voyeurisme malsain. On reste efficaces, focalisés sur la cible, sur ces personnages sans identité, sans passé… Peuvent-ils alors avoir un futur ?
Mr. Nobody s’avère être une belle surprise, prenante, bien trouvée, efficacement mise en scène, n’ayant pas besoin d’en faire des tonnes pour intéresser et accrocher le lecteur. Bonne pioche !