Volume unique par Icori Ando, édité en VF par komikku en janvier 2015.
Sens de lecture japonais, 130x180mm, 8,50€.
Après Les fleurs du passé, komikku continue de s’intéresser au josei avec cette fois-ci le one-shot Snow Illusion d’Icori Ando.
Susumu rencontre Yuki à un arrêt de bus d’une ligne abandonnée. Très vite, ils se marient et semblent filer le parfait amour. Yuki répond en tout point aux critères encore très “vieille école” (pour ne pas dire sexistes) attendus des femmes dans ce coin reculé : obéissante, douce, travailleuse, au service de son mari. Ce n’est par exemple pas le cas d’Aika, à peine revenue de la ville après un divorce sur laquelle tout le village aime cancaner…
Dans ce volume Icori Ando revisite à sa sauce le mythe de yuki-onna, la femme des neiges (le titre japonais est plus explicite là-dessus “Yuki-onna Genso : michiyuki hen“), qu’on avait déjà pu apercevoir dans Shirahime syo de Clamp (Shirahime : la princesse des neiges). Une femme aux longs cheveux noirs et à la peau très blanche dont l’apparition coïncide avec la tombée de quelques flocons inattendus. Une femme énigmatique qui laisse souvent dans son sillage tristesse, incompréhension et douleur.
Ici, c’est une femme qui cherche l’amour. Mais un amour semblable à un flocon de neige : éphémère, prêt à fondre au moindre changement de température. Ainsi, l’amour qui doit réchauffer son cœur ne peut durer : il ne doit jamais évoluer, jamais connaître le moindre changement, rester comme figé par le froid. Tout ce que n’est pas l’amour, et de manière plus générale, tout ce que n’est pas la vie, éternelle fuite en avant faite de hauts et de bas qui ne peut jamais connaître le moindre équilibre durable sous peine de perdre ce qui en faire son sel et son énergie, le changement, par les rencontres, les expériences, les erreurs et apprentissages qui en découlent.
Mais Yuki, comme maudite pour l’éternité, n’est pas la seule à se leurrer. Les hommes qui tombent sous son charme discret et rassurant sont les premiers à se laisser berner par l’illusion d’une vie parfaite sans aspérité, sans épreuve, où rien ne peut changer, où tout est acquis… pour finalement tout perdre, après avoir été pris dans une vie sans réelle épaisseur, sans réalité, comme hors du temps. Des hommes bernés non par une femme, mais par leurs propres illusions sans risque, sans goût, sans chaleur…
Icori Ando semble être une jeune mangaka, peu de volumes à son actif, mais prouve déjà avec Snow Illusion une très bonne maîtrise de son récit, sachant apporter un bon rythme à sa narration ainsi qu’une ambiance très éthérée, un rien angoissante, à ces diverses rencontres avec une femme à la recherche de l’impossible. Son trait est fin, délicat, plutôt élégant, correspondant bien à son sujet. Et elle parvient à laisser planer quelques doutes, des questions à peine murmurées pour clore un récit en équilibre entre le quotidien de couples qui n’osent pas parler de peur de briser le fragile lien qui les unit et le mythe vaporeux de la femme des neiges…