Série en cours par Mihachi Kagano, éditée en VF par Ki-oon, en VO par Shueisha.
Sens de lecture japonais, 130x180mm, 7,90€.
Premier volume sorti en mars 2014, 212 pages.
Après un premier manga historique s’intéressant à la célèbre famille Borgia avec Cesare, Ki-oon récidive cette fois-ci avec Ad Astra, dont Komikku avait déjà préparé le terrain avec son one-shot Eurêka !. Si ce dernier s’était concentré sur l’histoire du siège de Syracuse, la nouvelle série de Ki-oon nous place au cœur du duel de deux stratèges…
En 241 avant J.-C., l’armée carthaginoise menée par Hamilcar Barca doit abandonner la Sicile aux troupes romaines et admettre sa défaite. Le jeune Hannibal Barca assiste à l’humiliation de son père face aux orgueilleux romains qui ne savent alors pas que le petit garçon deviendra près de vingt ans plus tard la plus grande menace contre leur armée.
Décidément, l’Antiquité est à l’honneur ces derniers temps au rayon manga où l’on peut se plonger dans une histoire qui nous est physiquement toute proche puisque se déroulant dans le bassin méditerranéen (sans pour autant qu’elle nous soit forcément très familière). Les Romains tentent d’y asseoir leur suprématie militaire, ne faisant pas grand cas de la fierté de leurs adversaires vaincus qu’ils piétinent sans pitié. Face à un tel pouvoir, qui oserait se rebeller même pour défendre son honneur ?
Apparaît alors un jeune général de Carthage, témoin de l’humiliation de son peuple, se voyant comme l’élu du dieu Baal, venu sur Terre pour se venger et abattre Rome. Loin d’être un simple fou arrogant, il s’agit bien là d’un des plus grands stratèges de l’époque, capable de manipuler, réveiller l’âme guerrière des plus résignés, retourner les situations les plus difficiles par son audace et ses idées nouvelles. Face à lui, des élites romaines trop sûres d’elles, incapables d’imaginer la moindre faille dans leurs plans de conquête, refusant d’envisager l’improbable mais néanmoins possible défaite. La lutte serait alors très inégale si le camp romain ne voyait pas un des siens se révéler à la hauteur de l’adversaire, en la personne de Scipion, fils du commandant de l’armée. Le seul capable de voir le danger et d’y faire face.
N’étant pas du tout spécialiste du sujet, je n’ai pour autant eu aucun mal à me plonger dans ce premier tome, montrant l’irrésistible ascension d’un génie a priori peu attachant. Enfant, il nous est présenté comme pratiquement inhumain, sans émotion, sans âme, aux talents et à l’intelligence politique et militaire évidemment très exagérés (mais c’est comme ça que se construisent les légendes), l’élevant quasiment au rang de demi-dieu comme un Hercule ou un Persée voué à un destin hors du commun.
Des années plus tard, démontrant un savoir-faire indiscutable, il devient l’ennemi juré de Rome, utilisant les tactiques les plus inattendues pour abattre les légions adverses, trop sûres d’elles et ayant tendance à sous-estimer tout individu ayant l’impudence de s’élever contre elles. Débarque alors le véritable personnage principal de la série, des dires mêmes du mangaka dans la postface, le jeune Scipion qui, sous ses airs de fils à papa gâté et indolent, cache un esprit de déduction et un instinct qui lui permettront de tenir tête au général carthaginois.
Sans aucun doute, il y a des erreurs historiques et autres libertés prises par l’auteur pour raconter cette histoire. Mais on tient là un divertissement intelligent et prenant, sachant expliquer les plans de combat et autres stratégies sans ennuyer, avec des phases de bataille plutôt impressionnantes et un Hannibal fascinant (nettement plus agréable à regarder que la version d’Iwaaki dans Eurêka !, heureusement…) dans sa capacité à déjouer les pronostics les plus pessimistes et à se placer comme un véritable adversaire à l’hégémonie romaine. Et la montée en puissance de Scipion promet elle aussi d’apporter son lot d’action et de plans passionnants pour parvenir à mettre en déroute un ennemi imprévisible.
Pour sa première série, Mihachi Kagano réussit son coup en nous plongeant au cœur d’un duel épique, prenant, avec même quelques petites pointes d’humour discrètes qui ne cassent pas le rythme mais évitent trop de sérieux plombant.
Reste à voir ce que donneront les volumes suivants – 5 tomes au Japon pour le moment – et si l’auteur parvient à garder ce rythme efficace.
Rien d’étonnant en tout cas de le trouver chez Ki-oon aux côtés des Bride Stories et autres Wolfmund…
Merci pour la critique, ça donne envie !
Mince, ça me rappelle mes cours de latin tout ça ! 🙂