Film d’animation de Tomm Moore, 1h33.
Sortie en salles en France le 10 décembre 2014, en Blu-ray et DVD le 19 mai 2015.
Après Brendan et le secret de Kells en 2009, Tomm Moore revient avec son deuxième long métrage, Le Chant de la Mer, toujours profondément empreint de la culture irlandaise et des traditions celtiques.
Ben va être grand frère. Sa mère Bruna devrait accoucher d’ici peu et le petit garçon s’en réjouit, tout en écoutant avec passion les légendes qu’elle lui raconte avant de dormir. Mais un soir, tout est bouleversé…
Six ans plus tard, Ben vit toujours sur cette petite île perdue avec son chien Joe. Il s’agace de devoir constamment veiller sur sa petite sœur Maïna, muette, tandis que leur père reste désespérément prostré depuis la disparition de sa femme. Et leur grand-mère ne cesse de vouloir les emmener loin, sur le continent…
Pour son deuxième film, Tomm Moore continue d’explorer les traditions celtiques pour nous proposer une plongée magnifique en compagnie de deux enfants devant faire face à l’incompréhension des adultes. Ils sont rares, les auteurs qui parviennent ainsi à mettre en images une histoire où notre monde quotidien rejoint celui des légendes, sachant garder un délicieux équilibre entre deux univers où le rationnel froid de l’un fait tout pour effacer la magie de l’autre. Ici, cette magie fonctionne parfaitement, nous faisant partager la quête fraternelle de Ben, petit garçon en colère d’avoir vu tout son univers parfait voler en éclat le soir de l’arrivée de sa petite sœur qu’il ne voit que comme un gros boulet. Son père ne le regarde plus et Maïna enchaîne les bêtises avec toute la charmante candeur de ses 6 ans. Ne manque plus que la grand-mère citadine, qui pense forcément mieux savoir que lui ce qui est bon pour deux gamins en manque d’amour.
Graphiquement, le film est un bijou. On retrouve le style très personnel et efficace de Brendan et le secret de Kells, avec ces personnages au physique particulier, donnant d’autant plus corps à leur caractère. Le travail sur les couleurs, les dégradés, les teintes est sublime, apportant là encore une profondeur à chaque image, nous plongeant dans un monde mi-humain mi-féérique tout en subtilité et en délicatesse. Enfin, la musique de Bruno Coulais et les chants traditionnels magnifient d’autant plus l’ensemble, à la fois merveilleux, bourré de tendresse et de poésie.
Difficile de ne pas penser, au cours du film, à des références à l’univers de Miyazaki. Totoro pour la partie quête de deux enfants dans un univers sauvage et féérique où l’absence de la mère est le moteur de tout. Chihiro et Le château ambulant pour le personnage de Macha, sorte de mélange entre Yubaba et la sorcière des landes, ne balançant jamais vers la méchanceté gratuite mais rendue aigrie et excessive par un amour trop douloureux. On retrouve également tout ce côté magique et poétique autant dans le travail de Miyazaki que de Moore, chacun plongé dans la culture de son pays respectif, deux îles d’ailleurs, où les religions et croyances animistes apportent une base solide et très riche.
Si le héros du Chant de la Mer est un petit garçon, ce sont pourtant des femmes qui en sont les personnages forts : Bruna la mère, Macha la sorcière et bien sûr Maïna, comme c’est le cas également dans nombre de Miyazaki, et dans les traditions animistes où la “divinité” centrale est souvent féminine. Amaterasu dans le shinto japonais, les déesses-mères de diverses cosmogonies de par le monde, la Pachamama en Amérique du sud, Gaïa chez les Grecs, etc. Dans Le Chant de la Mer, pas de divinité centrale mais les selkis, les fées de la mer, capables de délivrer tout le monde du petit peuple de leur lente disparition d’un monde humain qui les a oubliés et enterrés.
Enfin, au delà de la question purement traditionnelle, il y a simplement l’histoire d’un petit garçon qui doit accepter la disparition de sa mère, tandis que son père doit lui aussi apprendre à vivre au delà de sa douleur. Ainsi, chaque personnage est d’une manière ou d’une autre confronté à la souffrance et au chagrin et chacun doit trouver le moyen de vivre ses émotions, même difficiles. Car l’oubli pur et simple n’est jamais une solution viable, emprisonnant l’individu dans l’impossibilité de vivre réellement et ressentir l’intégralité de sa vie, les bons moments comme les périodes les plus difficiles.
Ainsi, en 1h33, Tomm Moore parvient à nous embarquer dans une magnifique histoire, pleine d’aventures, de jolies rencontres, de tendresse, d’amour et de poésie, avec beaucoup de douceur et de délicatesse. Les enfants comme les adultes pourront facilement s’y laisser plonger avec bonheur. Un très joli film.
Quel joli film.
Je suis en plein accord avec cet critique. Ce réalisateur est à suivre ( et ce blog aussi ;)). La qualité technique, la réalisation et les histoires de ses deux premiers films en font de petits bijoux d’animations.
avec CETTE critique, hum