8 décembre 2022

Jack et la mécanique du cœur

Film d’animation de Mathias Malzieu et Stéphane Berla, 1h34.
Sortie en salles en France le 5 février 2014, sortie en Blu-ray et DVD prévue le 7 juillet 2014.

Lors du dernier Festival d’Annecy, j’avais pu assister à une séance spéciale durant laquelle nous étaient présentées les premières images de Jack et la mécanique du cœur, en présence notamment de Mathias Malzieu, leader de Dionysos, qui nous gratifia également pour l’occasion de quelques chansons, avec l’aide de Babet et Olivier Daviau. De quoi titiller ma curiosité…

mecanique01Tout commença par un roman, La mécanique du cœur, écrit par Mathias Malzieu en 2007. Puis un CD de 18 chansons avec les participations d’autres artistes, comme Olivia Ruiz ou Grand Corps Malade. Et pour finir, un film d’animation sorti en février 2014, réalisé par Mathias Malzieu et Stéphane Berla, utilisant ces chansons et quelques autres inédites pour mettre des images sur ce conte explorant l’amour et ses épreuves à surmonter.

Édimbourg, 1874. Jack est né paraît-il le jour le plus froid du monde avec un cœur gelé. Il ne doit sa survie qu’à Madeleine, la femme qui aida sa mère à accoucher et remplaça son organe inutile par une horloge. Les années passent au fil des tic-tac de son cœur. Jack grandit à l’abri des regards dans la maison de Madeleine. Mais il rêve de sortir et rencontrer du monde, ce que sa mère adoptive finit par accepter à regret. Sa première découverte de la ville le mène jusqu’à une petite chanteuse qui l’envoûte, Miss Acacia… Pourra-t-il tenir sa promesse de suivre les trois lois dont la plus importante : ne jamais tomber amoureux ?

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Je m’étais procurée le roman pour pouvoir comparer son histoire avec le film. Si les deux partent des mêmes bases et partagent la même essence, l’exploration du sentiment amoureux, le traitement est finalement assez différent. Là où le roman suit l’histoire d’amour sur plusieurs années, apportant forcément un développement plus poussé, clairement plus cru (et approfondissant notamment le personnage de Madeleine et son amour pour Jack, avec un rebondissement qui change quand même pas mal de choses), le film reste plus “grand public” (destiné aussi à l’international), plus chaste (on ne connaît par exemple pas le nom du hamster de Jack…), la romance ne roucoulant que sur quelques jours, avant l’arrivée de l’éternel élément perturbateur.
Là où le roman, s’il s’intéresse à l’amour au départ, décrivant à quel point il peut bouleverser une existence, s’axe ensuite plus précisément sur les désillusions, les embûches, la jalousie, la souffrance, pour proposer une fin très amère et désenchantée, le film reste lui plus focalisé sur le sentiment naissant, cette mécanique amoureuse qui se met en route, jouant plus sur le registre féerique et merveilleux de l’instant. Pour autant, pas de mièvrerie mais beaucoup de poésie, de sensibilité, de justesse, avec ces premiers pas maladroits, remplis de peurs, de doutes, qui se mêlent à l’énergie étourdissante procurée par ces tic-tac frénétiques.

Techniquement, le résultat est très agréable à l’œil, que ce soit niveau textures, très belles, ou animation, fluide et naturelle. Les premiers échos parlaient  d’un style à la Tim Burton, j’ai pour ma part beaucoup pensé à du Terry Gilliam ou du Michel Gondry. Notamment par le côté très fantasque, foutraque, aussi bien des décors, des accessoires, certains personnages, le tout dégageant une petite pointe de folie burlesque, beaucoup d’originalité, un côté très onirique, avec cette fête foraine façon Caravane de l’étrange, Freak Show, pas vraiment gothique et mélancolique à la Burton, plutôt bizarre et énergique, comme avec ce train fantôme fou furieux qui déboule sur un rock endiablé.
De plus, la scène où Jack et Meliès traversent la Mancha pour rejoindre l’Andalousie sur une planche à roulettes, surfant au milieu des moulins à vent, fait forcément penser à Terry Gilliam et son Don Quichotte avorté vu que le futur réalisateur du Voyage dans la Lune est (magnifiquement) doublé par Jean Rochefort (voyez Lost in la Mancha si ce n’est pas déjà fait !).

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On pouvait craindre de se retrouver là face à un clip géant juste là pour illustrer les chansons du CD, ce n’est heureusement pas du tout le cas car celles-ci sont utilisées intelligemment, sans excès, que ce soit pour des transitions de scène très rythmées, ou pour faire partager l’intimité des personnages. Le film n’est pas un prétexte pour elles, elles sont là pour le servir lui et son histoire, apportant un vrai plus, une identité propre à une œuvre qui ne manquait déjà pas de personnalité.

L’adaptation de romans baroques n’est jamais simple : le ratage de Patrice Leconte avec Le magasin des suicides de Jean Teulé prouve qu’avec un matériel de base intéressant et original, un style graphique bien trouvé et des doubleurs de talent, on peut tout de même se planter. Mais ici Mathias Malzieu apporte une nouvelle vie à Jack, Miss Acacia et toute la troupe de sa Mécanique du cœur, débordant de trouvailles, de dynamisme, avec toute la bande des doubleurs dont, pour une fois, les noms connus ne sont pas là juste pour vendre. Olivia Ruiz, Grand Corps Malade, Jean Rochefort, Rossi de Palma, Dani, Babet, Arthur H, Alain Bashung (effrayant !!), Marie Vincent… tous savent donner vie à leur attachant personnage, chacun ayant su trouver sa petite touche personnelle à apporter.
Jack et la mécanique du cœur s’avère une réussite, attachante, tendre et touchante, avec beaucoup d’amour à l’intérieur.

2 réflexions sur « Jack et la mécanique du cœur »

    1. J’étais sûre qu’on allait me demander ça 🙂
      Difficile à dire, franchement. Il n’y a rien de choquant, a priori, mais je ne sais pas trop comment réagiraient les plus jeunes (avant 10 ans) face à l’ambiance ou l’histoire. J’aurais tendance à dire début ado, 10-12 ans, sans certitude…

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