Volume unique par Takashi Sugimoto et Naotsugu Matsueda, édité en VF par komikku en novembre 2016.
Sens de lecture japonais, 130x180mm, 8,50€.
Ma première lecture manga de l’année est à chercher au rayon thriller puisqu’il s’agit du one-shot L’île du temps de Takashi Sugimoto et Naotsugu Matsueda chez komikku.
L’île de Yagô était pendant le XXe siècle le siège d’une mine d’or fructueuse. Mais le gisement a fini par se tarir et tous les employés ont quitté les lieux, laissant sur place d’immenses habitations vides et beaucoup de questions sur cette communauté qui vivait alors très repliée sur elle-même.
De nos jours… Une équipe de production vient sur l’île pour tourner un épisode d’une émission TV. Ils sont seuls sur place, et le côté lugubre des lieux a tôt fait d’exciter l’imagination de chacun. Les légendes sur la mine, ces bâtiments immenses et vides… Le jeune Jun reçoit alors un message d’un mystérieux individu lui annonçant leur mort à tous dans les 48h ! Comment le sait-il ? Car il lui écrit du futur !
J’aime beaucoup le format one-shot pour ce genre d’histoire car on ne perd pas de temps dans des renversements de situation foireux. Le récit va directement à l’essentiel et apporte rapidement les réponses sans nous enfumer ou nous faire tourner en rond.
Et c’est exactement le cas ici, où on entre rapidement dans le vif du sujet, sans pour autant en faire trop dans les effets gore inutiles ou un côté glauque forcé.
Ainsi l’ambiance n’est pas mauvaise quand ils débarquent tous sur l’île. Certes, des rumeurs circulent, et ces immenses immeubles vides sont impressionnants. Certes, il y a quelques tensions dans l’équipe mais globalement, rien ne semble présager le moindre problème. Puis le premier message du futur arrive (il faudra juste m’expliquer comment un portable peut envoyer des messages dans le passé, c’est le seul truc que je ne comprends pas…).
Les personnages en eux-mêmes sont plutôt plaisants. On voit vite que chacun est censé correspondre à un archétype habituel de ce genre de récit – le mystérieux, la nerveuse, la candide, le pervers, le rigolo, le flippé, le vieux en perte de vitesse, l’autoritaire et le jeune premier – mais ils ne sont en fait pas si caricaturaux, même s’ils restent assez peu développés concrètement. On n’a donc pas l’impression de se retrouver face à des personnages si basiques et prévisibles que ça sur le long de l’histoire.
En fait l’ensemble est même très sobre par rapport à ce qu’on retrouve habituellement dans ce type de récit. Pas de réactions hystériques pleines de cris et de panique surjouée, plutôt une sorte d’hébétement et scepticisme parfaitement vraisemblables. Le déroulement joue selon les règles du genre, on retrouve les enchaînements de drames mais avec un juste équilibre qui évite de tout faire sombrer dans un grand-guignolesque grotesque.
L’histoire joue au final assez peu sur l’émotion, dans le sens où on s’attache peu aux personnages et que leur mort ou leur survie n’est pas vraiment ce qui importe. Mais la manière dont le scénariste développe son récit et met en place chaque pièce avec intelligence donne alors aux dernières pages une saveur très particulière bien trouvée.
Le dessin en lui-même est de plus classiques mais remplit son rôle, avec une narration plutôt dynamique et efficace.
L’île du temps s’avère une lecture intéressante, habile, bien ficelée, au final pas du tout décevant, du genre à faire relire le manga une deuxième fois pour voir ce qu’on a pu louper.