20 août 2022

Tempête de boulettes géantes

Film d’animation de Phil Lord et Chris Miller, 1h30.
Sortie en salles en France le 21 octobre 2009, en Blu-ray et DVD le 24 février 2010.

boulettes01En 2009, quand est sorti le film d’animation Tempête de boulettes géantes, ma première réaction a été “Mais c’est quoi ce titre à la con ?”. Suivie de “Mais qui sont les blaireaux qui vont aller voir ça ?”. Ha ha ha.
Quelques années plus tard, je me rends compte que c’est moi la blaireau (blaireaute ?) en question, pour avoir jugé un film sur juste rien. Fichus préjugés. Après avoir assisté lors du Festival d’Annecy 2013 au making of du deuxième épisode (sorti au cinéma en février 2014), j’avoue avoir été intriguée au point de prendre le DVD pour voir ce qu’il en était.

Depuis sa plus tendre enfance, Flynn Lockwood est inventeur. Inventeur de trucs pas forcément très réussis ou utiles – les rats-oiseaux, vraiment ? – mais ses multiples échecs ne l’empêchent pas de rêver d’une trouvaille ultime qui permettrait vraiment d’aider les gens de Swallow Falls, capitale de la sardine. Sauf que la sardine, c’est dégueu, les habitants doivent donc s’empiffrer du poisson malodorant pour vider un peu les stocks. Flynn veut changer ça et invente donc le Fldsmdfr… la machine qui qui transforme l’eau en nourriture !

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Bon, le titre con – digne successeur de L’attaque de la moussaka géante et autres Retour des tomates tueuses (un des premiers rôles de G. Clooney quand même !) – n’induit pas en erreur : on est là face à un film à l’humour plutôt con mais totalement assumé et finalement assez déjanté et même quelque peu critique. Critique de la société, notamment américaine, où règne la loi du “Toujours plus, toujours plus gros” sans aucun discernement, avec une simple vision à très court terme où tout ce qui compte est la satisfaction immédiate de toutes ses envies, sans aucune conscience des conséquences possibles, avec refus total et entêté de la moindre notion de frustration. Même si cela créé une énorme réserve de restes qui s’entassent derrière un barrage “réputé indestructible” (donc qui pète deux minutes plus tard, forcément), symbole absolu d’une société pourrie-gâtée où le culte de l’épicurien est devenu une ode à la goinfrerie irresponsable,  aveugle et totalement indécente (on parle quand même d’un pays qui organise des concours de plus gros bouffeur de hot-dogs ou de burgers quitte à tout vomir après, hein ?!).
Le gros plan du gamin gavé de bonbons en plein trip sucré est assez parlant également, et montre qu’on n’est pas là juste face à une blague potache rigolote sans aucun message. Il est d’ailleurs assez comique d’imaginer le film projeté dans une salle remplie de gens avec leur énorme pot de popcorn et leur litre de coca…

Le fond est donc loin d’être inexistant, avec également cette heureuse critique du sexisme où la miss météo, ex-nerd intello binoclarde, se force à rengainer ses phrases intelligentes pleines de mots compliqués pour les échanger avec des phrases de cruchouille niaise qui n’a le droit que de s’extasier sur une paire de pompes, dans l’espoir de réussir à s’intégrer. Jubilatoire en terme d’ironie un peu grinçante, notamment face à un présentateur TV qui ne voit que les grosses lunettes ou le chouchou dans les cheveux quand le monde derrière est en train d’exploser, littéralement parlant. L’Apocalypse ou le style, il faut choisir !

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Du fond, il y en a donc, bien plus que je ne l’aurais cru, planqué derrière divers degrés d’humour, du plus basique et direct au plus ironique. Et la forme est belle elle aussi. Le design des personnages est volontairement simple – mais travaillé car chacun a le sien – pour faire passer un maximum d’expressivité, les décors sont ultra-colorés et la technique n’est pas en reste, comme le prouve la qualité du rendu de la mer ou des nuages.
L’ensemble regorge de détails, avec de l’humour d’arrière-plan ou des petites phrases a priori anodines mais en fait très drôles, et des personnages complètement déjantés, n’hésitant jamais à en faire toujours plus : Flynn  qui bruite ses actions dans son labo pour leur donner un côté plus high-tech, le flic qui a les poils du torse qui se dressent quand un truc se prépare, Brent le cas typique de la grosse brute populaire, symbole de la ville adepte des costumes les plus… originaux pour se faire remarquer, le père de Flynn nul en informatique alors que tout le sort du monde repose sur lui (scène hilarante pour toute personne ayant déjà dû aider au téléphone ses parents paumés sur leur ordi), Steve le singe, monument à lui tout seul, etc. Sans oublier tous les clichés des films d’action et catastrophe totalement détournés, extrémisés, explosés au fil des rebondissements toujours plus débiles.
Ajoutons là-dessus un doublage VO franchement sympathique, dont je retiens personnellement la toujours hilarante Anna Faris en Miss Météo ambitieuse et Mr. T en flic super-héros et papa-poule.

Bref, on passe là un excellent moment, sans humour lourdingue, scato ou en dessous de la ceinture, avec des personnages plutôt tarés, drôles, un scénario totalement débile et assumé, proposant plusieurs degrés de lecture, tous réjouissants, permettant d’intéresser un public large sans pour autant devoir foutre tous ses neurones en pension. Le tout est original, punchy, blindé d’idées et file la patate sans nous prendre pour des veaux. J’ai déjà dit que les préjugés, c’était vraiment con ?

3 réflexions sur « Tempête de boulettes géantes »

  1. Depuis que j’ai vu La Grande Aventure Lego des mêmes réalisateurs, j’avoue que ce film me fait drôlement envie. Et ta chronique ne fait que renforcer ma curiosité 🙂

    1. Que ce soit dans Tempête ou Lego, je trouve une certaine ironie grinçante là où les deux réal n’hésitent pas à pointer les excès de leur propre public : dans Tempête, le côté “Bouffe à gogo, surconsommation à fond” qui cible le public amateur de divertissement ciné avec popcorn et coca au litre, et dans Lego, les ultra-fans collectionneurs qui oublient qu’à la base, c’est quand même un jeu fait pour être utilisé en tant que tel… Ça reste une critique non dénuée de tendresse mais tout de même. Ça me plaît bien.

  2. C’est clair que ça donne envie d’aller voir le film, idem pour celui sur le Lego, que j’ai superbement ignoré

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